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Avec Howling Songs, Matt Elliott nous livre le dernier volet de la trilogie qu'il avait entamée avec Drinking songs et Failing songs. Au cours des dernières années, l'autodidacte originaire de Bristol, qui vit aujourd'hui en France, s'est détaché des compositions expérimentales et drum'n'bass de The Third Eye Foundation qui ont fait sa renommée.
Dans la lignée des deux précédents albums, c'est à travers une instrumentation traditionnelle qu'il a choisi de mettre en avant ses qualités de compositeur et d'interprète solo, flirtant tantôt avec Tom Waits (Something about the Ghosts, Berlin and Bisenthal), tantôt avec Nick Cave .
Entre les accompagnements au violon à la mélancolie balkanique et les accès de fureur hispanique portés par les cordes, se dessine une musique pleine de réflexion et d'introspection. En ouverture, The Kübler Ross Model, donne le ton par son allusion directe à la psychiatre américaine qui a décrit les cinq phases du deuil. Avec sa voix pour seule arme, Matt Elliott nous entraîne avec lui sur les routes abandonnées d'un monde de désolation, de fantômes et d'inquiétude. Jusqu'à la dernière phase: l'acceptation.
Les mélodies sont épurées, et contrairement aux deux précédents opus, la voix est pleinement assumée. Matt Elliott poursuit son exploration d'une musique folk enrichie de sonorités tziganes ; il affirme d'ailleurs préférer se tourner vers l'Est plutôt que vers l'Amérique, qu'il décrit culturellement "comme un enfant de 12 ans qui crie et qui hurle, mais qui ne s'exprime pas vraiment. L'Europe, elle, s'attache à conserver une culture vivante, loin du capitalisme occidental moderne".
Il clôt d'ailleurs l'album avec le pessimiste Bomb at the Stock Exchange, dont le titre fait référence à l'attentat du 16 septembre 1920 à New York, et conclut avec cynisme: “If you’ll top yourself anyway / Why not bomb the Stock Exchange?”. La rage intérieure qu'il semble contenir affleure de temps à autre dans les tourbillons et les bourrasques instrumentales de A Broken Flamenco et Bomb at the Stock Exchange, comme pour céder la place à l'imagination. Matt Elliott confirme cette prédilection pour le bruit qu'il compare aux expériences de privation sensorielle: "devant un mur de bruit, on est comme face au silence absolu... les rêves et l'imagination se mettent en marche". Nul doute que cette digression solo, intimiste et personnelle, laissera sa trace dans l'oeuvre de Matt Elliott pour le prochain album de The Third Eye Foundation attendu courant 2009. (C.D.)
Howling Songs, Ici, D'Ailleurs / Differ-Ant
Site officiel de Matt Elliott : www.thirdeyefoundation.com
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