Somewhere, de Sofia Coppola

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Somewhere, de Sofia Coppola

Les films de Sofia Coppola sont similaires à la contemplation que l'on expérimente à l'accoutumée dans les musées. Statique, on s'installe, on observe chaque recoin puis c'est l'ensemble qui nous rattrape.

Dans ses trois premiers films, la benjamine de la famille Coppola s'était abstenue de se dévoiler dans une histoire père-fille. Somewhere est sorti, sans nous révéler un Œdipe mal senti.

Des voitures, de la bière, des strip-teases, de la crème glacée et des cigarettes. Autant d'accessoires qui nous mènent vers une relation d'une profondeur inouïe entre un père et sa fille. Stephen Dorff, en vedette hollywoodienne de tous les vices, et Elle Fanning, dans le rôle d'une enfant presque femme. Ce duo d'acteurs inattendu forme un couple de personnages feutré, en ne faisant qu'effleurer la puissance et l'émotion de Lost in Translation, deuxième long-métrage de Sofia Coppola.

Une conférence de presse en Italie et la question est soulevée : « Who is Johnny Marco ? ». Pas encore adolescente, sa fille lui maintient la tête hors de l'eau. Lorsqu'il l'accompagne, vaguement ennuyé, à son entraînement de patins à glace, il découvre des mouvements gracieux et justes qui le sortent de sa torpeur. Les volants du justaucorps se soulèvent, comme la mini-jupe de la strip-teaseuse, grimée en tenniswomen la veille au soir. Cleo est faite femme par cette seule scène.

Porté dans un univers empreint de pudeur, on voudrait que cette heure et demi dure encore pour atteindre les méandres de l'indicible. A contrario, Sofia Coppola nous donne une impression de facilité en s'obstinant à terminer un film qui mériterait de rester en suspens. Toute la difficulté de l'approche réside dans la dichotomie : si Somewhere est profond, il faut néanmoins le prendre à la légère.

Juliette Pham, Sophie Ruch et Pauline Hofmann

Un film de Sofia Coppola avec Elle Fanning, Stephen Dorff et Chris Pontius – Pathé Distribution

Sofia Coppola, portrait

Il y a l’écume des choses : baptisée à un an devant la caméra de son père dans Le Parrain, la fille de Francis Ford Coppola ne pouvait prétendre à un autre avenir que celui digne d’un des meilleurs scénarios hollywoodien.

Durant sa jeunesse, Sofia Coppola apparaît dans plusieurs films de son père. Diplômée du California Institute of the Arts, elle ébauche une carrière dans la mode et devient l’assistante de Karl Lagerfeld avant de se faire rattraper par sa destinée, le cinéma. En 1998, elle réalise un premier court-métrage, Lick The Star. Un an plus tard, elle réalise Virgin Suicides. Dans ce premier long-métrage à l’esthétisme particulier, Sofia Coppola dépeint l’adolescence avec un cynisme percutant. L’univers particulier de la jeune touche-à-tout la hisse parmi les figures importantes du cinéma.

Cousine de l’acteur Nicolas Cage, ex-épouse du très doué Spike Jonze, ancienne compagne du talentueux Quentin Tarantino, Sofia Coppola a toujours été entourée de personnes ne pouvant que la mener au sommet du septième art, avant de s’éprendre du chanteur de groupe Phoenix, Thomas Mars, père de ses deux filles.

Contrairement à d’autres personnalités davantage reconnues pour leur entourage que par un éventuel talent, Sofia Coppola se distingue : sa réussite est indéniablement une affaire de chance et de famille teintée de pudeur et de sobriété. Particularités qu’elle met en scène dans ses films et particulièrement dans la prouesse cinématographique de Lost In Translation avec Bill Murray et Scarlett Johansson.

L’élégance de son talent tout en discrétion caractérise la plupart de ses réalisations, avec quelques surprises de bon goût. Avec style, elle chausse Kirsten Dunst de Converses dans son film Marie-Antoinette sorti en 2006, réalise un film publicitaire aussi girly que catchy pour le nouveau parfum de la maison Dior, Miss Dior Chérie. Egérie du parfum Marc Jacobs en 2002, créatrice d’une collection capsules de sacs Louis Vuitton, autant de collaborations qui élèvent Sofia Coppola au rang très prisé des it girls.

Bien qu’elle puisse, à juste titre, susciter l’envie, les critiques à son sujet se font rares : l’intemporalité de son talent et la discrétion de son style forcent l’admiration de cette cette new-yorkaise à la tête et à la vie bien remplie.

Sophie Ruch

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